TRAITE DE PAIX CONCLU ENTRE LA REPUBLIQUE FRANCAISE ET L'EMPEREUR DE TOUTES LES RUSSIES
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS, BONAPARTE, premier Consul, PROCLAME loi de la République le décret suivant, rendu par le Corps législatif le 18 frimaire an X, conformément à la proposition faite par le Gouvernement le 8 du même mois, communiquée au Tribunat le lendemain.
DÉCRET.
Le traité dont la teneur suit, conclu à Paris le 16 vendémiaire an X [8 octobre 1801] entre la République française et sa majesté l'Empereur de toutes les Russies, et dont les ratifications ont été échangées à Paris le 19 vendémiaire an X [11 octobre 1801], sera promulgué comme une loi de la République.
Traité de paix entre la République française et sa majesté l'Empereur de toutes les Russies.
Le premier Consul de la République française, au nom du peuple français, et sa majesté l'Empereur de toutes les Russies, animés du désir de rétablir les relations de bonne intelligence qui subsistaient entre les deux Gouvernements avant la guerre actuelle, et de mettre un terme aux maux dont l'Europe est affligée, ont nommé, à cet effet, pour leurs plénipotentiaires ; savoir, le premier Consul de la République française, au nom du peuple français, le C.en Charles-Maurice Talleyrand, ministre des relations extérieures ; et sa majesté l'Empereur de toutes les Russies, le sieur Arcadi, comte de Marcoff, son conseiller privé actuel et chevalier de l'ordre de Saint-Alexandre-Neuski, et grand'croix de celui de Saint-Waldimir, de la première classe ; lesquels, après la vérification et l'échange de leurs pleins pouvoirs, sont convenus des articles suivants :
Art. Ier Il y aura dorénavant paix, amitié et bonne intelligence entre la République française et sa majesté l'Empereur de toutes les Russies.
II. En conséquence, il ne sera commis aucune hostilité entre les deux États, à compter du jour de l'échange des ratifications du présent traité ; et aucune des parties contractantes ne pourra fournir aux ennemis de l'autre, tant extérieurs qu'intérieurs, aucun secours ou contingent en hommes ni en argent, sous quelque dénomination que ce soit.
III. Les deux parties contractantes, voulant, autant qu'il est en leur pouvoir, contribuer à la tranquillité des Gouvernements respectifs, se promettent mutuellement de ne pas souffrir qu'aucun de leurs sujets se permette d'entretenir une correspondance quelconque, soit directe, soit indirecte, avec les ennemis intérieurs du Gouvernement actuel des deux États, d'y propager des principes contraires à leurs constitutions respectives, ou d'y fomenter des troubles ; et, par une suite de ce concert, tout sujet de l'une des deux puissances qui, en séjournant dans les États de l'autre, attenterait à sa sûreté, sera de suite éloigné dudit pays, et transporté hors des frontières, sans pouvoir, en aucun cas, se réclamer de la protection de son Gouvernement.
IV. Il est convenu de s'en tenir, quant au rétablissement des légations respectives et au cérémonial à suivre entre les deux Gouvernements, à ce qui était d'usage avant la présente guerre.
V. Les deux parties contractantes conviennent, en attendant la confection d'un nouveau traité de commerce, de rétablir les relations commerciales entre les deux pays, sur le pied où elles étaient avant la guerre, en tant que faire se pourra, et sauf les modifications que le temps et les circonstances peuvent avoir amenées, et qui ont donné lieu à de nouveaux règlements.
VI. Le présent traité est déclaré commun à la République batave.
VII. Le présent traité sera ratifié et les ratifications échangées dans l'espace de cinquante jours, ou plutôt si faire se peut.
En foi de quoi, nous soussignés, en vertu de nos pleins pouvoirs, avons signé ledit traité et y avons apposé nos cachets.
Fait à Paris, le 16 Vendémiaire an X de la République française [8 Octobre 1801].
Signé CH. MAU. TALLEYRAND ; le comte DE MARCOFF.
Collationné à l'original, par nous président et secrétaires du Corps législatif. A Paris, le 18 Frimaire, an X de la République française. Signé BARAILON, président ; CHAMPION (de la Meuse), DEVAUX, BOUISSEREN, CHARREL, secrétaires.
SOIT la présente loi revêtue du sceau de l'État, insérée au Bulletin des lois, inscrite dans les registres des autorités judiciaires et administratives, et le ministre de la justice chargé d'en surveiller la publication. A Paris, le 28 Frimaire, an X de la République.
Signé BONAPARTE, premier Consul. Contresigné, le secrétaire d'état, HUGUES B. MARET. Et scellé du sceau de l'État.
Vu, le ministre de la justice, signé ABRIAL.