L. S.
DE TALLEYRAND,
ADRESSEE A
EDOUARD BIGNON,
MINISTRE PLENIPOTENTIAIRE
A HESSE CASSEL
SUR LES PREPARATIFS
DE LA BATAILLE D'AUSTERLITZ
EN DATE DU
19 FRUCTIDOR AN XII
[6 SEPTEMBRE 1805]
Paris. 19 Fructidor An XIII [6 septembre 1805].
Vous devez recevoir, Monsieur, et peut-être lorsque cette dépêche vous sera remise par le courrier qui doit la porter en toute diligence, aurez-vous reçu une lettre de M. le Maréchal Bernadotte, vous annonçant qu’il se rend en France avec l’armée d’Hanovre en traversant l’Allemagne et vous invitant à demander que le passage lui soit accordé par la Hesse électorale. Dès que vous aurez reçu cette lettre de M. le Maréchal Bernadotte, vous passerez sur le champ à la Cour de Cassel, tous les offices nécessaires pour que le dit passage soit accordé.
Vous ferez connaître que M. le Maréchal Bernadotte se rend en France par Wurtzbourg. Vous direz que ce mouvement de l’armée d’Hanovre ne se fait point dans des vues et pour un but hostile, et que le continent étant encore en paix, la neutralité de l’électorat ne saurait être compromise par la marque de déférence que l’Empereur attend de lui ; que le rappel de l’armée d’Hanovre est seulement une mesure commandée par la prudence dans un moment où l’Autriche réunit tant de troupes dans le Tyrol et qu’il est alors tout simple que toutes les forces françaises se réunissent et se concentrent sur le Haut-Rhin. Le ton de votre note doit être celui de la confiance et de l’amitié.
Si l’électeur faisait des difficultés, comme l’intention de Sa Majesté n’est pas que, quelque soit la volonté de la Cour de Cassel, M. le Maréchal Bernadotte soit retardé d’un jour, vous ferez comprendre verbalement en termes très modérés et très circonspects que le Maréchal Bernadotte ne pouvant pas ralentir sa marche, sera tel jour en tel endroit et tel jour en tel autre. Vous ajouterez qu’on exigera rien des habitants et que ce qu’ils auront fourni leur sera bien payé et le sera comptant.
Vous informerez sans délai M. le Maréchal Bernadotte, soit du consentement de l’électeur s’il le donne, soit de son refus, pour que, dans ce dernier cas, M. le Maréchal passe outre, mais en prenant les précautions qu’il jugera convenables.
Tels sont, Monsieur, les ordres que Sa Majesté m’a chargé de vous transmettre. Je ne doute pas que vous ne les exécutiez avec votre zèle, votre promptitude et votre habileté ordinaires.
Recevez, Monsieur, les assurances de ma parfaite considération.
Ch. Mau. Talleyrand.
Louis Pierre Édouard Bignon