24 août 1831

Monsieur le comte,

J’ai reçu la dépêche que vous m’avez fait l’honneur de m’écrire, le 22 de ce mois.

Vous aurez vu, par le protocole N° 34, que je vous ai envoyé hier, que la Conférence avait proposé une suspension d’hostilités de six semaines pour pouvoir s’occuper immédiatement d’un traité définitif entre la Hollande et la Belgique ; il n’y aura, à cet égard, aucun délai ; M. Devaux est nommé commissaire pour la Belgique et on l’attend à chaque instant.

L’évacuation de la citadelle d’Anvers et celle de Venloo, que vous m’indiquez par votre dépêche comme un des premiers objets à régler, trouveront naturellement leur place dans le traité qui va avoir lieu et si on en faisait aujourd’hui l’objet d’une convention particulière, il faudrait nécessairement la reprendre dans l’arrangement final puisqu’elle n’aurait eu, jusque-là, qu’un caractère provisoire, caractère qu’on ne veut donner à aucune stipulation.

J’insiste sur une observation que j’ai faite dans ma dépêche du 22 et je vous engage à ne faire demander au roi Léopold que ce qu’il peut faire, c’est-à-dire, de signer une convention secrète avec la nomenclature des places dont vous désirez la démolition, convention qui serait la réalisation de la promesse qu’il a déposée entre mes mains, et dont vous avez une copie. Je répète que cette convention doit être extrêmement secrète car si elle venait à être connue, elle nous créerait des difficultés avec les Puissances qui s’attribuent un droit sur ces forteresses et sur leur matériel, prétention qui doit être examinée.

Cette observation me conduit à vous dire que M. Adair, n’ayant aucun rapport avec la conférence, n’ayant reçu d’elle aucun pouvoir pour agir à Bruxelles, elle ne verrait pas de motif suffisant pour le charger, aujourd’hui, d’entrer en négociation avec le gouvernement belge, et avec M. de Latour Maubourg, relativement à la démolition des places. Il est probable que les membres de la Conférence qui ont aussi leur susceptibilité et pour lesquels le gouvernement anglais est plein d’égards, verraient, avec peine, que la suite de cette affaire fût remise entre les mains du seul plénipotentiaire anglais en Belgique.

La Prusse, ayant montré un vif désir qu’il y eût entre la Hollande et la Belgique, une suspension d’armes qui éloignât de sa frontière les mouvements de la guerre, j’ai envoyé hier à M. de Flahaut une copie du protocole N°34 ainsi que je l’avais fait à M. de Larochefoucauld.

Agréez, Monsieur le Comte, l’assurance de ma haute considération.

Ch. Mau. TALLEYRAND.

P. S. Le portefeuille de dimanche n’est pas encore arrivé aujourd’hui mercredi.