LETTRE
DU PRINCE DE TALLEYRAND
AU
DUC DE BROGLIE
MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES
EN DATE DU
4 JUILLET 1833
N° 135
Londres, le 4 juillet 1833
Monsieur le duc,
J’ai reçu la dépêche que vous m’avez fait l’honneur de m’adresser sous le N° 75.
Je transmets par le portefeuille d’aujourd’hui des dépêches de La Haye qui arrivent à l’instant et qui vous apprendront la nomination faite par le roi des Pays-Bas de M. Verstolk de Soelen, son ministre des Affaires étrangères, comme second plénipotentiaire adjoint à M. Dedel. Je suis porté à croire que cette nomination indique une volonté prononcée de finir, et je pense, comme M. d’Eyragues l’écrit, que, d’après le caractère connu de M. Verstolk, il n’a pu se charger de cette mission qu’avec des pouvoirs assez étendus pour conclure. On attend les deux plénipotentiaires néerlandais le 7 ou le 8, et nous serons, après leur arrivée, bientôt en état de juger s’ils apportent vraiment avec eux les moyens de négocier et de signer un traité définitif.
J’ai communiqué à lord Palmerston les résolutions adoptées par le gouvernement du Roi au sujet des Douanes, dont vous avez bien voulu m’informer. Lord Palmerston s’en est montré fort reconnaissant, et m’a chargé en son nom et en celui des autres membres du cabinet de vous en témoigner toute leur satisfaction.
Par ma dépêche N° 131, j’ai eu l’honneur de vous mander que le cabinet anglais chercherait des moyens de conciliation pour sortir des embarras, qui lui avaient été suscités dans la chambre des Communes ; il a atteint ce but en faisant à propos quelques concessions dans le Bill sur les affaires temporelles de l’église d’Irlande. Les difficultés sont à peu près aplanies, et le ministère parait assuré aujourd’hui d’arriver heureusement jusqu’à la fin de la session à travers même les entraves inséparables des luttes parlementaires. La session finira probablement au milieu du mois d’août.
On a reçu ce matin la nouvelle sans détails du débarquement de l’expédition dirigée par MM. de Palmella et Villa-Flor, à Lagos sur la côte des Algarves. Cette expédition qui n’est que de 2 500 hommes, ne s’est pas trouvée assez forte pour oser aborder à Lisbonne, où elle comptait sur des intelligences.
Le général Solignac est arrivé à Londres et s’est présenté chez moi, mais je ne l’ai pas encore vu.
Le duc de Richmond me demande chaque jour si les ratifications de la convention qu’il a signé avec M. Comte sont arrivées. Il est pressé de mettre la convention sous les yeux de la chambre, et cela ne peut avoir lieu qu’après l’échange des ratifications.
Agréez, Monsieur le duc, l’assurance de ma haute considération.
Ch. Mau. TALLEYRAND.
MAE - ARCHIVES DE NANTES - AMBASSADE DE LONDRES - SERIE K - CARTON 13